Alors que le développement durable et l’écologie sont des enjeux au cœur de l’actualité, et dont les organisateurs de festivals se préoccupent de plus en plus, j’ai eu l’opportunité de discuter avec Maeva, référente développement durable au sein de l’Association Nuits Secrètes.

Avec des modèles, comme le We Love Green ou Le Cabaret Vert, chaque festival doit désormais mettre la main à la patte en ce qui concerne l’environnement et la protection des lieux mis à disposition pour l’événement. Quand des grosses machines comme Rock en Seine s’appuie sur des onduleurs hybrides pour redistribuer de l’énergie verte, utilise exclusivement de la lumière led, et propose quelques alternatives de consommation à leur public (écocup essentiellement) qu’en est-il de son lointain cousin du Nord de la France ?

Le Festival Nuits Secrètes, ce sont 3 jours de musique au cœur de la petite ville d’Aulnoye-Aymeries, près de Maubeuge, avec une programmation riche, et surtout des parcours secrets qui offrent un suspens supplémentaire pour le public, et donnent aux artistes la possibilité de jouer dans des lieux insolites. En moyenne un festival de musique en extérieur produit 180 tonnes de déchets, pour les Nuits Secrètes en 2018, on était sur un chiffrage de l’ordre de 7 à 10 tonnes maximum en incluant le lieu du festival et le camping pour une présence de 45 000 festivaliers sur 3 jours de fête.

« Le développement durable ne concerne pas uniquement l’écologie » nous rappelle Maeva, en effet il est aussi question d’environnement, d’économie et de social. « Cela consiste à coordonner les actions, et les dispositifs mis en place par le festival, gérer le traitement des déchets, la réduction de la consommation d’énergie, mais aussi l’accessibilité pour les PMR (ndlr : personnes à mobilité réduite) ou les personnes en difficultés financières. Au niveau économique, il faut gérer tout ce qui est circuit court, notamment des achats locaux et si possible responsable, et aussi tout ce qui est en économie circulaire (ndlr : recyclage) et l’économie sociale et solidaire, notamment l’insertion de personnes dans le festival pour leur permettre d’avoir par exemple une première expérience de travail » nous explique Maeva

L’accessibilité est donc tout naturellement au cœur des préoccupations de l’organisation de Nuits Secrètes, notamment pour les personnes à mobilité réduite, afin de leur permettre d’accéder au site de façon simplifiée, avec bien évidemment des plateformes pour permettre une meilleure visibilité des concerts.

L’importance du développement durable pour le festival est désormais ressentie dans chacun des pôles, qu’il s’agisse de la communication, ou de l’administration chacun prend en compte une charte rédigée par le Festival pour expliquer qu’il faut « valoriser un producteur local, ou une filière naissante, et surtout créer un déchet moins impactant » ajoute-t-elle

Pas à pas, les Nuits Secrètes creusent un sillon dans la sensibilisation du public, et dans l’envie de faire mieux pour la planète, cependant « on ne sait pas avoir une empreinte carbone neutre mais on souhaite limiter les consommations d’énergie, le but n’est pas de faire du green-washing » précise Maeva. En effet il reste quelques failles dans un système toujours perfectible, mais en se concentrant sur un projet à la fois, cela permet de le mener à maturation, « cette année on a un plus gros dispositif de tri des déchets, notamment concernant la vaisselle dans laquelle les food-trucks vont servir à manger et les contenants dans lesquels on sert les boissons. » nous explique-t-elle

Certes, il n’y a toujours pas d’Ecocup cette année, « il y a un manque de moyens humains, financiers, et logistiques pour le mettre en place, cela demande de gros approvisionnements d’eau… Pour l’année prochaine ce sera bon, d’autant plus qu’il y a la loi sur la fin de l’utilisation des plastiques à usage unique. Pour cette année en étant sur du gobelet jetable on a essayé de faire en sorte que ce ne soit pas perdu, on s’est rapproché du prestataire de traitement de déchets de l’avesnois Flamme, et ils nous ont trouvé une entreprise qui va racheter nos gobelets, les fondre et en refaire du plastique, c’est une pratique qui se fait au Cabaret Vert à Charleville Mézières ou au Dour Festival en Belgique, ils vont être compressés en gros ballots, et ce ballot va être vendu. » ajoute-t-elle

Concrètement cela est très simple, « il y aura sur le site du festival une logistique de mise en place pour que ces gobelets soient isolés, sur-triés, pour enlever ce qui peut être coincé dans les gobelets par exemple, on les nettoie, et on les redonne au centre de tri. Il y aura un PC propreté sur le festival pour que tout ce travail de valorisation soit fait. Les festivaliers vont être influencés à trier leurs déchets, avec des stations de collectes, qui seront assez jolies, faites avec des palettes, et ils y seront accueillis par des bénévoles qui les aideront à bien trier leurs déchets. » dit-elle

« L’an prochain si nous passons au gobelet réutilisable nous aimerions les faire non-siglés car les gens repartent avec, le problème c’est que l’empreinte carbone devient vite élevée, entre le plastique, la fabrication, le transport, et chaque année il faut recommencer car les gens sont partis avec… Notre but serait de ne pas en faire un goodies, pour ne pas avoir à en recommander à chaque fois. » confie Maeva en souriant.

Et comme les autres années, le petit bonus incitatif pour être sûr que les gobelets soient recyclés, et placés au bon endroit, si vous ramenez 30 gobelets au bar, le festival vous offre une boisson de 25 cl.

 

De la même façon, il faut éviter que les mégots ne viennent polluer le sol du festival, d’une part parce que les mégots ne sont pas biodégradables, et d’autre part parce que ce n’est pas hygiénique, certes il n’y aura pas de distribution de cendriers de poche, mais cette année « on a un designer qui va créer les points de collecte de déchets qui va construire des cendriers collectifs équipés de plaques en plexiglas pour visualiser la quantité de mégots recueillis, et veiller à ce que ne soit pas par terre » nous explique-t-elle

Dans le cadre du développement durable, on considère qu’il « faut réflechir à toutes les options, et ne pas tomber dans celle qui semble la plus courante ou la plus évidente » souligne Maeva, en effet faire comme tout le monde n’est pas forcément la meilleure option, surtout si ce n’est pas viable.

L’association s’est donné une vocation dont elle a fait un mantra, « réduire les déchets à la base, le meilleur déchet c’est celui qui n’existe pas » dit-elle avec passion.

Aux Nuits Secrètes, nul n’est laissé sur le carreau et chacun participe à sa hauteur à la protection de l’environnement, comme elle nous l’expliquait précédemment, les achats en vrac et les producteurs locaux sont privilégiés, mais cela change la donne également côté coulisses, « on limite ce qui est mis en loges car souvent ce n’est pas consommé. Cette année tout ce que les artistes demandent sera mis dans une sorte de magasin où ils pourront aller demander ce qu’ils souhaitent, en faisant en sorte que ce soit en vrac, et le moins possible de produits industriels, typiquement ils trouveront des produits de la région, des fromages du coin, des fruits et légumes du coin et de saison, on essaie de faire appliquer une charte d’éco responsabilité à tout le monde. Et du coup on sensibilise aussi les artistes en leur expliquant qu’il n’y aura pas forcément de snickers ou de mars dans les loges, mais des équivalents, en trouvant quelque chose de local, de bon. Et les artistes sont compréhensifs et reconnaissants, d’ailleurs de plus en plus viennent avec leur gourde, pour éviter d’avoir à se faire fournir des bouteilles d’eau. » nous précise Maeva

« Les bouteilles d’eau c’est vraiment le déchet ennemi, du moins pour les festivals qui sont passés en Ecocups et qui n’ont plus que ça à gérer. Nous, on a installé des fontaines à eau potable, branchées sur le réseau de la ville, elles seront accessibles gratuitement sur le festival que ce soit côté public, ou côté artistes. En tant que public il est possible de venir avec sa gourde » ajoute-t-elle

« La carte des boissons au bar a été revue, un gros effort a été fait niveau alimentation, donc cette année pour les boissons on a décidé de faire pareil, aux bières locales et bio vont s’ajouter des boissons non alcoolisées originaire de l’Avesnois, notamment des jus de pommes ou de poires, et on remplace tout ce qui est gazeux par de la limonade qui vient de Saint Omer » commente Maeva

Enfin, il est tout à fait possible de se rendre aux Nuits Secrètes à vélo, en transports en commun, en covoiturage ou même en train avec Eter, l’opération estivale de la SNCF, et gros bonus tout cela en voyant la totalité des concerts pour ensuite repartir vers vos lieux de vie à l’issue de la soirée.

Chaque année il faut repenser sa façon de construire le développement durable sur le festival, et des idées naissent déjà pour les années à venir. Par exemple, Maeva pense à installer « un espace réservé au développement durable pour l’année prochaine pour accueillir des associations qui sensibilisent à l’écologie, l’environnement, aux droits de l’homme etc. »

L’idée est lancée, il ne reste plus qu’à trouver preneur pour l’édition 2020 des Nuits Secrètes !

Crédit photos : Emilie Zasso et Caroline Coolen

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